Revenant de la campagne, j'ai enfin le haut-débit pour vous raconter ma dernière chasse.
Bottes bien cirées, culotte qui -à mon grand étonnement- a retrouvé sa couleur d'avant la Mongolie, veste impeccable et damart sous la chemise.
Lever à 8h (un samedi matin!), gros petit déj, ciel couvert, problèmes habituels pour le noeud de cravate de chasse, chignon qui ne tient pas sous la bombe et une demi-heure pour mettre mes nouvelles lentilles.
Arrivée dans les premiers à la Chapelle de la Mare, le lieu de rendez-vous, en forêt de Sillé (72 -pays des rillettes, des 24h et des poulets de Loué).
On selle, on bride, on écoute le rapport et on part. Tranquille, c'est les vacances. Quand on est pas monté depuis six mois et une chute ayant coûté une côte, on prend son temps pour le rodage.
La chasse part vite, très vite, et naturellement, nous perdons la chasse. Nous: c'est Diane et moi qui chevauchons côte à côte. Plus tard, les aboiements et les sons de trompes et de piboles se rapprochent. La chasse est en-dessous de nous. On y est presque. Pas de chance. Le temps de trouver une allée pour descendre en contre-bas, la chasse s'était déjà volatilisée. Sûrement à vive allure. Le vent entrant dans la partie, on n'entend plus que le bruissement des arbres.
Alors on a traversé la forêt. Courrant après la chasse. Au pas, au trot et au galop, dans le vent et sous la pluie. Et on a retrouvé les chiens et l'équipage quinze kilomètres plus tard. Dans ce fond de la forêt, toute la faune est réunie. Des chevreuils et des biches passent sans arrêt, comme des autos sur le périph. Notre cerf est malin, pour dérouter les chiens il les attire sur mille traces différentes.
La recherche prend du temps. La trace est retrouvée, alors la poursuite s'engage, taïaut, taïaut! puis reperdue. Au détour des allées, les cavaliers de l'équipage, par deux ou trois, sont à l'affût.
Vers 16h, lancés à la suite du cerf, on le voit traverser une propriété, longer un château, des corps de fermes et sauter dans un pré pour se mêler aux vaches. Poursuivi par les chiens, fatigués après cinq heures de course, il sort de sa retraite, traverse une grande route et retourne sous les bois.
Deux heures après, au son de la trompe, c'est enfin l'hallali. Acculé, entouré par les chiens, aussi fatigué qu'eux, le cerf s'effondre sous le coup d'une dague. La chasse est finie. La journée tout autant. La nuit est presque tombée. On descend de cheval après une journée en selle. On étanche la soif, on dévore les sandwiches, puis on couvre les chevaux et on file chercher vans, camions et voitures restés à l'autre bout de la forêt. Une fois les chevaux embarqués, les sonneurs, en rang, annoncent la curée.
La trentaine de chiens louche sur le cerf reposant devant eux. Après les trompes, c'est à eux. Ils le savent, le sentent, attendent. Le maître d'équipage ôte la tête et la peau du cerf qui recouvraient sa chair découpée juste avant. Au signal, les chiens se ruent dessus. Sus à la bête! Leur dîner est toujours accompagné des trompes. L'équipage, fourbu, trouve encore la force de sonner jusqu'à la fin.
Les trompes de chasse retentissent dans la nuit, noire, désormais.
Et maintenant, sus au dîner!